Test : Tannoy Legacy Cheviot

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Mis à jour le 26 février 2019.

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Ami(es) de la hi-fi vintage, le test de cette semaine devrait vous ravir. Il y a quelques mois, Tannoy annonçait trois nouvelles enceintes, intégrées à une nouvelle gamme Legacy. Legacy signifiant héritage et Tannoy n’étant pas une marque junior, l’annonce avait de quoi susciter l’intérêt, sinon l’envie de voir débarquer sur le marché des enceintes conçues à l’ancienne, avec un format atypique, ni compactes, ni colonnes. Effectivement, les Tannoy Legacy Eaton, Tannoy Legacy Cheviot (notre test) et Tannoy Legacy Arden détonnent.

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Un peu d’histoire

Lorsque Tannoy développe dans les années 1970 les enceintes Tannoy Eaton, Cheviot, Arden, Devon et Berkeley, la mode n’est pas encore aux enceintes colonne fines comme des tiges. Loin s’en faut. À cela une raison bien simple : pour produire des basses fréquences convenablement articulées, il faut utiliser des haut-parleurs de grand diamètre. Tannoy n’a alors rien inventé, ce sont les lois de la physique : plus la surface émissive est importante et meilleurs sont le régime transitoire du haut-parleur ainsi que son rendement. Tout ceci concourt à réclamer à l’ampli moins de puissance, avec à la clé une distorsion naturellement faible. Si les enceintes que nous connaissons aujourd’hui emploient de petits haut-parleurs, c’est que la mode est à l’installation des enceintes les plus discrètes possibles chez soi.

Test Tannoy Legacy Cheviot
Les enceintes Tannoy Eaton, Cheviot, Arden, Devon et Berkley originales des années 1970. En arrière plan à droite, la Tannoy Cheviot.

La philosophie qui anime la gamme Tannoy Legacy va totalement à l’encontre de cette tendance. Notre Tannoy Cheviot est un objet impressionnant, non par ses dimensions (elle ne mesure que 86 cm de hauteur), mais par ses proportions et la qualité des matériaux employés. Le placage en chêne par exemple est absolument magnifique, d’une douceur exquise au toucher. Et on y passe du temps figurez-vous, tant un niveau de qualité comme celui-ci est rare. D’ailleurs, Tannoy livre un pot de cire d’abeille pour prendre soin du bois naturel de la Cheviot.

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Tannoy Legacy Cheviot : présentation

L’enceinte Tannoy Legacy Cheviot est une 2 voies à haut-parleur coaxial de 30 cm, chargé en bass-reflex par deux résonateurs circulaires à évents frontaux. Sa sensibilité s’établit à 91 dB, ce qui laisse présager d’une réponse en fréquence linéaire, comprise entre 38 Hz et 30 kHz d’après le fabricant. Signe que l’enceinte est bien conçue à l’ancienne, on trouve sur la face avant un système de réglage de sensibilité et de la courbe de réponse du tweeter.

Cette latitude de réglages offerte à l’utilisateur est un luxe, car elle permet d’ajuster très finement la restitution de l’enceinte, tant à l’ampli associé qu’à la pièce d’écoute.

La Tannoy Cheviot est conçue pour les grandes pièces de vie, mais son gabarit n’interdit pas de l’utiliser dans une pièce de vie de 15 m2, d’autant que sa profondeur est faible (26 cm). Si l’écoute musicale semble être la première application de cette enceinte, elle semble parfaitement exploitable en home-cinéma, sans appui indispensable d’un caisson de basses.

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Les enceintes Tannoy Legacy Cheviot, avec, en arrière plan, l’ampli McIntosh MA252 (préamp à tubes, amp à transitors).

Tannoy Legacy Cheviot : haut-parleur Dual Concentric

La technologie n’a rien de nouveau, puisqu’il s’agit du montage coaxial d’un tweeter à dôme au centre d’un cône. Elle permet une dispersion très cohérente des fréquences produites par les deux transducteurs. Et ce n’est pas du marketing, cela fonctionne vraiment très bien et de nombreuses marques ont ainsi recours à la technologie coaxiale (Elipson, KEF, Cabasse, etc.). Le haut-parleur Dual Concentric de la Tannoy Legacy Cheviot est cependant tout à fait atypique.

Ce transducteur est impressionnant, par son diamètre évidemment (30 cm), mais aussi par la forme de son cône, particulièrement profond. Ce n’est pas sans raison et le tweeter profite de cette forme pavillonnaire, qui mécaniquement amplifie les fréquences médium qu’il produit (incidemment le tweeter produit moins de distorsion puisqu’il oscille moins).

Ainsi, le tweeter joue particulièrement bas en fréquence (jusqu’à 1,2 kHz), ce qui évite de confier au cône de 30 cm la reproduction de fréquences sensibles. Tout l’intérêt est là : un cône de 30 cm ne peut osciller aussi vite qu’un dôme de 3,3 cm. Enfin, le cône est réalisé en pulpe de papier, ce qui lui confère des propriétés amortissantes optimales, renforcées par sa surface irrégulière.

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Le haut-parleur coaxial de l’enceinte Tannoy Legacy Cheviot dispose d’un cône avec double suspension à demi-rouleau. Sa qualité d’assemblage est assez spectaculaire.

Le tweeter est pratiquement invisible, caché derrière un guide d’onde plaqué or de type Tulip. Là encore, la forme de ce guide d’onde est celle d’un double pavillon, dont le rôle est de contrôler la directivité des hautes fréquences.

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Le tweeter à dôme de 3,3 cm en alliage d’aluminium et de magnésium est logé très loin au fond du cône et chargé par une double amorce de pavillon. C’est le fameux guide d’onde Tulip de Tannoy. La partie circonférentielle du guide est prolongée par le cône pour former un large pavillon acoustique.

Tannoy Legacy Cheviot : la charge

Le haut-parleur Dual Concentric de l’enceinte Tannoy Legacy Cheviot est chargé par un volume d’air accordé en bass-reflex, avec deux évents frontaux relativement courts. Leur volume cumulé, rapporté à celui de la caisse, plaide pour un accord situé dans le haut grave, selon toute vraisemblance pour linéariser la réponse de l’enceinte et parvenir à un juste équilibre entre registres grave et médium/aigu. La structure de l’enceinte est renforcée par des entretoises. La caisse de l’enceinte est composée de différents bois, MDF et contreplaqué par exemple, le haut-parleur étant arrimé à la face avant dans un bois de densité différente, pour réduire les vibrations.

Tannoy Legacy Cheviot : le filtre

Le filtre passif de l’enceinte Tannoy Legacy Cheviot est totalement bi-amplifiable et paramétrable. À l’arrière de l’enceinte se trouvent deux paires de borniers (LF et HF), que Tannoy a eu le bon goût d’assortir de cavaliers non pas métalliques, mais en câbles de cuivre pur. Chaque bornier est équipé d’une fiche banane transversale. Enfin, un cinquième bornier permet la mise à la terre éventuelle de l’enceinte, pour en améliorer encore le fonctionnement. Sur la face avant se trouve le dispositif de réglage du tweeter, composé de deux rangées de prises femelles. La rangée supérieure permet d’ajuster le rendement du tweeter, à la baisse comme à la hausse : -3 dB, -1,5 dB, 0 dB, +1,5 dB et +3 dB. Pour changer la valeur, il suffit de dévisser et déplacer le boulon préinstallé. La rangée inférieure influence la courbe de réponse dans les plus hautes fréquences (au-delà de 5 kHz), qu’il est possible d’augmenter ou d’infléchir.

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Le dispositif de réglage du filtre passif de l’enceinte Tannoy Legacy Cheviot.
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La vis de réglage de sensibilité du tweeter de l’enceinte Tannoy Legacy Cheviot.

Tannoy Legacy Cheviot : mise en oeuvre et impressions d’écoutes

Nous avons écouté les Tannoy Legacy Cheviot avec différentes électroniques. Un ampli Hegel H190 associé au lecteur réseau Marantz ND-8006, puis avec l’ampli McIntosh MA252. Les câbles utilisés étaient les Viard Audio Premium HD RCA-RCA et Viard Audio Silver HD12 HP. Nous avons expérimenté plusieurs réglages de tonalité et courbe, pour revenir naturellement à la balance d’origine, à nos oreilles idéalement équilibrée avec nos deux amplis. Sachez que les réglages sont clairement audibles, s’agissant de la sensibilité du tweeter et raffinés pour l’atténuation des très hautes fréquences.

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Le lecteur réseau Marantz ND-8006, source de choix pour l’enceinte Tannoy Legacy Cheviot.

Dès les premiers instants et en l’absence de rodage, à la fois des Tannoy Legacy Cheviot et du McIntosh MA252, le caractère homogène de la restitution, sa décontraction et son sens de l’échelle sont frappants. La Cheviot est une grande enceinte, aussi belle à regarder qu’à écouter. Si nous avons écouté des albums en haute définition et d’autres de qualité CD, ce ne sont pas les premiers qui nous ont impressionnés avec les Cheviot.

Cette enceinte démontre une nouvelle fois que si la prise de son et que le mixage sont de qualité, la résolution numérique n’est finalement pas si importante. On sent même que l’écoute d’une radio FM sur le couple Tannoy-McIntosh serait tout aussi saisissant.

La Cheviot met instantanément en confiance l’auditeur, le rappelant à ses meilleurs souvenirs hi-fi, pourtant très lointains. Avec la Cheviot, on ne prête plus guère attention à tel ou tel registre, le message musical s’impose naturellement. La force de l’ampli McIntosh, en comparaison du Hegel H190 qui nous accompagne depuis quelques mois, est d’étager à merveille la scène en injectant de l’espace entre les instruments et les voix, de texturer chaque son qui sort des enceintes. En cela, cet ampli est précieux (il fera l’objet d’un test à part entière très bientôt). Ainsi, la première impression que font les Tannoy Legacy Cheviot, est d’offrir un « vaste terrain de jeux auditif ». On prête attention avec amusement à telle corde pincée plus sèchement ici, à une respiration là, au bruit du public loin devant, aux applaudissements sur les côtés, etc. Tant de brio fait sourire.

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Tannoy livre de petits câbles pour interconnecter les borniers LF et HF, en cas de mono-amplification. Le cinquième bornier permet une mise à la terre de l’enceinte.

La Tannoy Legacy Cheviot met en exergue la couleur des prises de son de façon flagrante. De manière surprenante, des enregistrements qu’on pensait sans saveur se révèlent riches et dynamiques, tandis qu’à l’inverse des prises de son a priori exubérantes, se révèlent plates.

Avec les Cheviot, on peut très facilement trier le bon grain de l’ivraie.

Grave : le haut-grave est généreusement déployé, avec énergie et précision (petite tonique pendant le rodage). Le grave et l’infra-grave, légèrement en retrait sont véloces et bien intégrés. Aucune démonstrativité sur ce registre donc, qui ne fruste néanmoins pas. Batteries et guitares basse sont à la fête, profitent du très bon régime transitoire de l’enceinte. Beaucoup de vie donc.

Médium : la partie basse du registre est chaleureuse, presque flatteuse tant elle fourmille d’informations. Le médium est joliment placé, avec une énergie comparable à celle du bas-médium. Aucune dureté ni coloration dans le haut-médium.

Aigu : soyeux, presque suave avec le réglage par défaut, le registre des hautes fréquences se distingue par sa transparence.

Scène : très large et profonde évidemment, mais surtout servie par un peuplement très précis, qui fait le bonheur de nos oreilles.

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Le cache inférieur en tissu acoustique de l’enceinte Tannoy Legacy Cheviot.
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Le cache supérieur de l’enceinte Tannoy Legacy Cheviot.

Tannoy Legacy Cheviot, comparée à :

Klipsch Forte III : la grande Klipsch est bien plus généreuse dans l’infra-grave, plus autoritaire dans l’ensemble, moins raffinée dans le haut du spectre que ne l’est la Tannoy Legacy Cheviot. La Forte III est plus brillante dans l’aigu, plus « sucrée » si l’on peut dire, plus amusante, mais moins intime que la Cheviot.

Klipsch Heresy III : signature sonore pour l’Heresy III, avec un haut-grave et un bas-médium généreux, néanmoins moins articulés. La scène est moins vaste et précisément peuplée avec l’Heresy.

Focal Kanta n°2 : la Kanta est plus physiologique et ne soutient pas la comparaison en termes de peuplement de la scène sonore.

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Le pot de cire fourni par Tannoy. Odorant même fermé.

Tannoy Legacy Cheviot : conclusion

L’enceinte Tannoy Legacy Cheviot est une enceinte exceptionnelle, généreuse et chaleureuse, qui procure plaisir, détente et émotions à l’auditeur. Sa signature sonore est de celles qui font aimer la hi-fi, tout simplement. Avec elle, aucun enregistrement ne sonne comme un autre, les plus petits détails sont extraits et servent le propos des artistes. Dans 20 m2 ou dans 50 m2, nul doute qu’elle saura s’épanouir. Elle ne nous a pas semblé difficile à alimenter et tire clairement parti d’amplis de grande qualité, comme le McIntosh MA252 . Du travail d’orfèvre réalisé par Tannoy.

Nous avons aimé :

  • La restitution superbement nuancée
  • La signature chaleureuse
  • L’équilibre dynamique du grave à l’aigu
  • Les possibilités de réglage
  • Le plaisir auditif permanent
  • La qualité de fabrication stratosphérique

Nous aurions aimé :

  • Ne pas les rendre, évidemment.

10 COMMENTAIRES

  1. Un mot sur « cheviot », un nom qui sonne français mais qui ne l’est pas. C’est en fait à la fois le nom d’une région d’Ecosse (pays d’origine de Tannoy) et d’une race de moutons qui y vit. Lorsqu’ils ne sont pas tondus ces moutons sont caractérisés par un aspect particulièrement massif et trapu, qui ajouté à leur couleur beige-ocre, n’est pas sans rappeler les enceintes auxquelles ils ont donné leur nom… 🙂

    • Tannoy a sans doute fait référence au mont Cheviot plutôt qu’à ses moutons :). Ceci dit, oui, l’enceinte est un peu trapue, douce à caresser, alors qui sait, mais bon, aucune fragrance de mouton captée pendant le test et puis on atteint des sommets avec la Cheviot. C’est vraiment une super enceinte, c’est super qu’elle existe aujourd’hui encore, un peu dommage que le public se soit détourné de ce type de format, ce qui la réserve à un public aisé, donc par définition restreint.

  2. Pour avoir à la maison leurs ancêtres (des Mansfield) qui sonnent toujours admirablement , je confirme qu’il est dommage qu’on ait oublié ce format d’enceintes à Hp de grand diamètre. Vive la mode du vintage finalement !

  3. La Cheviot est elle « laid back » et donc pas forcement la plus adaptée pour des musiques groovy comme un bon vieux Michael Jackson? Je me souviens d’une écoute de la Turnberry, des timbres magnifiques une très belle cohérence mais une enceinte pas très rapide.
    Faut-il s’orienter davantage sur une klipsch forte?

    • Ce n’est pas l’impression qui ressort du test. Il faut savoir décrypter chaque mot employé par Tristan (il me viendra me corriger si jeme trompe) : par ex « décontracté » possède en général une connotation très positive et signifie que l’enceinte est capable de restituer fidèlement l’enregistrement même lorsque tout s’emballe et plusieurs instruments jouent en même temps à grande cadence (ça ne veut pas dire que ce que l’on entend est une musique décontractée). Par opposition, une enceinte bas de gamme va se « crisper », ie la superposition de tous les sons va finir en bouillie sonore inécoutable.
      Ici la dynamique semble non seulement être bonne, mais en plus rester cohérente d’un bout à l’autre du spectre. Vous pourrez savourer un bon vieux Michael Jackson pleinement et sans crainte à mon avis.
      Pour ce qui est de préférer ou non les Klipsch Forte, je ne saurais trop vous dire…

    • Un bon vieux Michael Jackson, à la façon des années 80, avec le matériel de l’époque, et du punch à revendre ? Si c’est l’écoute recherchée, les Forte III iraient mieux. C’est plutôt sur ces enceintes là que j’écouterais un Smooth Criminal, Black or White comme PYT. La Forte III sera expressive dans le grave et lumineuse dans l’aigu à bas niveau, avec une marge dynamique supérieure. Par contre, elle enveloppera davantage l’auditeur que la Tannoy Legacy Cheviot, qui posera une scène plus profonde. En espérant avoir aidé.

  4. Je cherche une enceinte avec un woofer de bon diamètre 25/30 cm encore logeable dans un salon de 30m2 (distance d’écoute à environ 2m) et qu’on peut placer à environ 30 cm du mur arrière(pas d’event à l’arrière).
    Mes écoutes sont plutot soul/funk/pop/rock/folk/hip-hop/un peu de jazz donc assez variées hormis le classique (très peu).
    J’écoute pas mal le soir à volume modéré donc effectivement le bon rendement des Klipsch doit être un avantage. Peut être que les Heresy pourraient suffir mais je crains qu’elles soient un peu juste sur le grave. Par contre pour avoir écouter les Turnberry, tannoy semble offrir de très beaux timbres.
    Merci pour votre retour.

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