Elvis Presley : Le Rewind présenté par Olivier Cachin

0
470

Le King, pour l’éternité. Il y en a eu d’autres après lui, Michael bien sûr, mais le premier roi de la musique contemporaine, c’est Elvis Aaron Presley, qui nous a quitté voilà 46 ans, au cœur de l’été punk, en août 1977. L’occasion pour le Rewind de vous offrir une rétrospective du Roi en cinq albums, et même un peu plus. Go !

YouTube player

The Complete Fifties Masters

Et on démarre cette sélection avec une compilation essentielle, un coffret titré The Complete Fifties Masters, sachant qu’il existe un coffret pour chacune des trois décennies qu’Elvis a traversé. On y découvre les premiers hits de ce rock & roll que lança Bill Haley & The Comets en 1952 avec le classique « Rock Around The Clock ». Sur cette compilation, on découvre les débuts du King, quand il inventait son style, entre gospel et blues, en mode rockabilly, entouré d’un groupe réduit aux acquêts, une contrebasse et une guitare pour accompagner sa voix, le tout enregistré dans les minuscules studios de Sam Phillips, boss du label Sun Records. Si Elvis n’est pas le premier artiste à mixer le son noir avec les rythmes blancs (et inversement), il est celui qui a porté ce mélange aux oreilles du monde entier, à une époque où l’apartheid régnait aux USA et où les musiques étaient conçues pour l’un ou l’autre public.

Le Colonel Parker, qui va gérer la carrière du chanteur d’une main de fer, n’est pas encore dans le décor quand sortent les cinq premiers disques sur Sun Records, et ce n’est pas lui qui a « inventé » Elvis, mais plutôt celui qui l’a marketé et commercialisé, négligeant parfois l’artistique pour se concentrer sur les apports financiers. Après ses débuts à gérer un artiste country, Parker va s’occuper d’Elvis en exclusivité, jusqu’à la fin de ses jours, faisant de lui la star planétaire qu’il est resté.

Elvis’ Christmas Album

Rewind 2, le Elvis’ Christmas Album. Un disque majeur qui confirme son goût pour d’autres musiques que le rock, et se plie à merveille à cette tradition américaine de l’album de Noël auxquels se sont livrés des artistes majeurs comme Phil Spector, les Beach Boys et plus récemment Mariah Carey. Sorti en octobre 1957, cet album demeure la meilleure vente des albums de Noël, restant quatre semaines au numéro 1 des charts US lors de sa sortie. Elvis renouvellera l’exercice en 1971. Si l’on retrouve sur l’album de 1957 des standards tels que « Silent Night » ou « White Christmas » d’Irving Berlin (qui détesta la version d’Elvis et aurait même été jusqu’à appeler certaines radios pour ne pas qu’elles diffusent cette version), le rock n’est pas oublié.

Ainsi, une chanson originale écrite pour l’occasion par le duo Jerry Leiber/Mike Stoller ouvre l’album, c’est « Santa Claus Is Back In Town », un blues rock aux paroles audacieuses puisqu’Elvis y incarne un curieux Père Noël qui n’a pas de traineau ni de cadeaux pour les enfants mais déboule dans une gigantesque Cadillac noire et promet de descendre dans la cheminée d’une jeune fille le soir de Noël. On imagine que le cadeau ne sera pas un train électrique. Anecdote amusante sur « Blue Christmas », une chanson écrite en 1948 : Les choristes de la version Elvis, les Jordanaires, ont changé les accords de la composition originale, introduisant ainsi des « notes bleues », créant du coup un jeu de mot pour les initiés et les musicologues.

Elvis Is Back !

Rewind 3, Elvis Is Back ! Le disque du grand retour après les deux ans de service militaire, avec une voix encore plus performante. L’album sort en avril 1960, c’est son premier en stéréo. Pour l’enregistrement de cet album crucial, le colonel Parker affrète un bus Greyhound qui va transporter Elvis et ses musiciens de Memphis à Nashville, où Elvis enregistrera avec son groupe vocal les Jordanaires ainsi que les suspects habituels Scotty Moore & Hank Garland (Guitares), D.J. Fontana (Drums), Floyd Kramer (Piano), Buddy Harman (Percussions) ainsi que le bassiste Bobby Moore, remplaçant de Bill Black qui a préféré tourner avec son propre groupe, le Bill Black Combo.

Des versions ultérieures de l’album incluront sa version de « O Sole Mio », retitrée « It’s Now Or Never », un des plus gros succès 45-tours d’Elvis. Les progrès de la technique, la nouvelle tessiture vocale d’Elvis et le choix des compositions font de ce disque un des premiers de son auteur à s’aventurer en territoire pop, « from teen idol to adult entertainer », comme l’écrivit le critique musical Steve Horowitz, qui s’émerveille d’entendre un artiste capable de passer du blues le plus pur à un son sophistiqué sans jamais changer de personnage.

Leiber & Stoller sont de la partie avec une composition, « Dirty, Dirty Feeling », un morceau qui avait été mis de côté lors de l’enregistrement de la B.O. du film King Creole, pour lequel il avait été écrit. Le genre de track rock aux lyrics satiriques qu’on n’imagine pas exister en ces temps de #MeToo (« Il parait que tu es bonne à la course à pied/ Mais dans pas longtemps tu vas glisser et tomber/ C’est là que je vais te ramener à la maison, girl/ Et je vais t’enchainer au mur »).

His Hand In Mine

Rewind 4, Jésus revient, ou plutôt Elvis se plonge dans le gospel avec His Hand In Mine, collection de chansons religieuses, avec sensiblement les mêmes accompagnateurs que sur Elvis Is Back (Pourquoi changer une équipe qui gagne). Premier des trois albums gospel qu’il enregistrera tout au long de sa carrière, ce recueil de douze titres a été capté lors d’une unique session de 14 heures, un exploit que d’aucuns qualifièrent de divin, mais qui prouve surtout qu’Elvis Presley est désormais un artiste au fait de son art, une machine à chanter à l’inspiration vocale inégalable.

Dans la stratégie du Colonel, ce disque est un gage de probité face aux ligues de vertu qui reprochent au chanteur la sexualité sauvage qui émane de son jeu de scène (le fameux coup du pelvis, censuré à la télé américaine qui le cadre à partir de la taille). De plus, Parker a déjà prévu d’orienter la carrière de son poulain vers le cinéma. Elvis à Hollywood, ce sera une longue suite de films (15 en huit ans !) aux scénarios oscillant entre le pathétique et le juvénile, le but étant de fournir à la star l’occasion d’interpréter des chansons à tout moment, même si les films d’Elvis n’étaient pas vraiment des comédies musicales. Des filles, des bagarres et de la danse, le tout en Technicolor bien sûr, tel était le programme.

On se souvient du sketch d’Eddie Murphy dans son premier one man show, « Singers », où il se moque d’Elvis en disant : « Il ne savait pas jouer, alors ils lui ont fait chanter ses dialogues : ‘Elvis, tu veux une limonade ?’ (Il prend une voix chantée, ndr) ‘Limonaaade, cette boisson si rafraichissante !’ » Toujours est-il que même si l’on n’est pas un chrétien convaincu, l’interprétation d’Elvis de « Milky White Way » et « Swing Down Sweet Chariot » ont la puissance nécessaire pour convertir les païens. L’accompagnement musical est minimal, toute la place est laissée à la voix du King, somptueuse et sensuelle. Contrairement à d’autres albums d’Elvis, His Hand In Mine ne va pas se loger en tête des charts, mais il finira quand même par obtenir une certification platine. Alléluia.

L’Elvis de la dernière période

Cinquième et dernier Rewind, et là on démarre les seventies avec un live de compétition, dans lequel le King chante « Let It Be Me », morceau d’origine française écrit par Gilbert Bécaud (« Je t’appartiens ») et « Proud Mary » de John Fogerty (de Creedence Clearwater Revival) qui sera popularisé par Ike & Tina Turner. C’est l’Elvis de la dernière période, celle du retour à Las Vegas, des concerts incessants après une longue absence, des tenues flamboyantes. Détail qui a son importance : Aucun nom n’apparait en couverture, juste la date et l’intitulé, February 1970, On Stage. Les chansons sélectionnées ne sont pas des classiques du répertoire d’Elvis mais des reprises parfois étonnantes.

On l’entend notamment reprendre le hit des Beatles « Yesterday », « Polk Salad Annie » de Tony Joe White et le blues « See See Rider », chanté en 1924 par Ma Rainey, la fameuse « mother of the Blues » qui fut interprétée par Whoopi Goldberg au théâtre et Viola Davis à l’écran en 2020 sur Netflix (ce qui lui valut une nomination comme meilleure actrice aux Oscars ©). « The Wonder Of You », d’abord interprété par Ray Peterson en 1959, sera numéro 1 aux USA et en Angleterre, restante en tête des charts pendant six semaines. Ray Peterson a raconté qu’Elvis lui avait demandé si cela le dérangeait qu’il enregistre sa version de la chanson. « Pas besoin de demander la permission, vous êtes Elvis Presley » lance Peterson. Du tac au tac, Elvis lui rétorque : « Si, je le dois. Vous êtes Ray Peterson ». La classe à Las Vegas.

Avec plus de dix millions d’exemplaires écoulés, ce live spectaculaire est une des bornes majeures de sa carrière, et la version sortie par Legacy en 2010 propose en bonus une série de versions inédites de classiques tels que « Are You Lonesome Tonight » et « Suspicious Minds » ainsi que des morceaux plus rares comme « Funny How Times Slips Away ». Sept ans après cet album d’exception, le King disparaissait à l’âge de 42 ans, laissant des millions de fans inconsolables. 45 ans après son décès, Baz Luhrmann sortait Elvis, sa version romancée de la vie du King, avec Tom Hanks postiché à l’extrême en Colonel Parker et le jeune Austin Butler, convaincant dans le rôle-titre. Une des curiosité de la riche bande-son de ce film baroque : Un rap d’Eminem, « The King And I » feat. Cee-Lo Green, dans lequel le rappeur peroxydé s’offre un duo virtuel avec Elvis au son d’un remake hip-hop de « Jailhouse Rock ». Avec des recettes dépassant les 260 millions de dollars, Elvis est le second biopic le plus rentable de tous les temps après Bohemian Rhapsody, et le cinquième film australien en termes de recettes. La légende continue, Elvis n’a pas complètement quitté le building.

Suivez toute l’actualité de Son-Vidéo.com sur Google Actualités.

Donnez votre avis !

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.