Elvis : retour aux sources du rock and roll

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Si John Carpenter s’était intéressé à Elvis Presley à l’occasion du Roman d’Elvis, son téléfilm fleuve de 1979, avec Kurt Russell dans le rôle titre, et qu’une poignée de films ont mis en scène le King, personne n’avait jusqu’à aujourd’hui adapté la vie de l’icône sur grand écran. Le réalisateur australien Baz Luhrmann s’étant finalement attelé à cette tâche ô combien complexe avec l’approbation de Priscilla Presley, l’ex-femme de la rock star, celle de sa fille Lisa Marie Presley et de Riley Keough, sa petite-fille, elle-même actrice. Un film très ambitieux qui remonte aux origines d’Elvis Presley, des débuts à Tupelo du côté de Memphis aux derniers shows à Las Vegas, sans pour autant jamais quitter le sol australien.

Le réalisateur australien Baz Luhrmann remonte aux origines d’Elvis Presley avec ce biopic éponyme.

King of Australia

Australien de naissance, Baz Luhrmann a, depuis le début de sa carrière, fait de son mieux pour tourner autant que possible sur ses terres. Le fait que la production ait commencé le 28 janvier 2020, pratiquement au moment de la fermeture des frontières au début de la pandémie de Covid-19, n’a fait qu’encourager le studio à se calfeutrer dans un lieu fermé. La production a cependant été stoppée dans son élan pendant plusieurs semaines, dès le mois de mars, en raison de la contamination de Tom Hanks, l’interprète du Colonel Tom Parker, le légendaire manager d’Elvis.

Le film a du suspendre le tournage pour cause de Covid-19.

Dès le début néanmoins, Elvis doit se tourner, au moins en partie, dans le sud des États-Unis. Mais les conditions financières bien plus avantageuses offertes par l’Australie et l’arrivée du Covid encouragent Baz Luhrmann à centraliser son tournage près de chez lui. Quand le premier coup de manivelle est donné, il n’est donc plus question de planifier des déplacements au-delà des océans. Même pas pour tourner à Graceland, la véritable maison du King, dans Beale Street à Memphis ou encore au sein des Sun Studios, où le musicien a effectué ses débuts. Totalement maître de son projet, Baz Luhrmann préfère rester chez lui et commande la construction d’ambitieux décors au sein des Village Roadshow Studios, à Oxenford, dans le Queensland, sur la Gold Coast. Connu comme l’un des centres de production les plus plébiscités du monde, là où ont été tournés notamment Aquaman et Thor : Ragnarok, le studio laisse les coudées franches au cinéaste. Les décorateurs travaillent d’arrache-pied, à partir de films et photos d’archives pour recréer les lieux marquants de l’histoire d’Elvis.

Travail de reconstitution

C’est la créatrice de production et chargée des costumes, Catherine Martin, que Baz Luhrmann choisit pour superviser cet énorme chantier. En guise de préparation, toujours avec l’aval des ayant-droits d’Elvis Presley, celle-ci a pu se rendre à Graceland pour prendre un nombre considérable de photographies des lieux. Elle fut même autorisée à prélever des échantillons de peinture pour reproduire avec un maximum de détails les intérieurs de la mythique demeure. Ainsi, elle fut par exemple en mesure de « refaire » le bleu Wedgwood, une couleur utilisée dans les années 1950, aujourd’hui désuète, visible dans un placard de Graceland, habituellement fermé au public.

De nombreuses photographies ont été prises à Graceland afin de reproduire le plus fidèlement les décors.

Pour reproduire Beale Street, la rue de Memphis où Elvis aimait s’abreuver de musique en écoutant les artistes afro-américains auxquels il a fini par emprunter plusieurs chansons, Catherine Martin s’est installée en dehors des Village Roadshow Studios et a gagné la ville d’Arundel dont toute une partie fut fermée. Les façades des bâtiments ont été largement modifiées et un véritable circuit a été mis en place à partir des routes existantes pour permettre aux voitures d’époque de rouler de manière crédible pendant les scènes. Les décorateurs n’ont négligé aucun détail, allant même jusqu’à rechercher des photos pour donner au mobilier urbain une apparence en tous points conforme.

Un véritable circuit a été mis en place à partir des routes existantes pour permettre aux voitures d’époque de rouler de manière crédible pendant les scènes.

Graceland, quant à elle, a été construite à partir d’une ancienne écurie, toujours sur la Gold Coast. Les économies réalisées grâce à l’absence de déplacements et aux réductions accordées par le gouvernement australien ont permis à Baz Luhrmann d’utiliser le moindre dollar de ses 85 millions de budget dans la confection de décors et de costumes parfaitement crédibles. Le réalisateur a également eu largement recours à l’imagerie de synthèse, que ce soit pour recréer le public durant les scènes de concert, afin d’éviter les regroupements de foule peu compatibles avec les nouvelles exigences sanitaires, mais aussi pour replacer ses scènes dans leur contexte. C’est ainsi que la dernière partie, située à Las Vegas, a également été filmée depuis les Village Roadshow Studios.

La dernière partie du film, située à Las Vegas, est finalement tournée depuis les Village Roadshow Studios.

Cela dit, le cas de Las Vegas est particulier. Ville en perpétuel mouvement, où les casinos trop anciens laissent régulièrement la place à de nouveaux, Sin City a beaucoup changé depuis l’époque où Elvis y jouait en résidence. Certains plans de la véritable cité du péché ont certes pu être insérés au montage, comme ceux de l’International Hotel, aujourd’hui encore reconnaissable, mais plus globalement, c’est grâce à la magie des effets numériques que Baz Luhrman a pu plonger ses acteurs, Austin Butler en tête, l’interprète du King, dans l’effervescence de la capitale du jeu. Austin Butler a également consciencieusement étudié le jeu d’Elvis, sa façon de se mouvoir et de parler, afin de littéralement se fondre dans son personnage.

Sur les traces du King of Rock and Roll

Si Baz Luhrmann n’a donc tourné aucune image sur les véritables lieux jadis fréquentés par le King, ses équipes n’ont pas manqué d’effectuer un pèlerinage à Memphis pour que la magie opère à l’écran. Pèlerinage dont voici les principales étapes…

L’équipe du film s’est rendu dans la modeste maison de bois où Elvis Aaron Presley a passé son enfance.

C’est au bout d’un long sentier que se dévoile la modeste maison de bois où Elvis Aaron Presley a passé son enfance, à Tupelo dans l’État du Mississippi. Située dans une rue depuis rebaptisée en son honneur, au numéro 306, la demeure est ouverte aux visites et jouxte la chapelle de la First Assembly of God, où le jeune homme se rendait avec sa famille. Non loin de là, trône également la Humes High School où il a étudié avant de prendre son envol pour devenir la plus grande star du monde.

De Tupelo à Memphis

L’histoire d’Elvis continue à Memphis où sa famille a fini par s’installer. L’appartement où les Presley ont vécu pendant quatre ans est resté inchangé. Non seulement il est possible de le visiter mais le logement est également disponible à la location. Il se situe au 252 N Lauderdale Street.

Beale Street permet de plonger ses visiteurs dans une atmosphère proche de celle qu’Elvis Presley appréciait tant.

Attraction principale du centre-ville, Beale Street a toujours résonné au son des musiciens de la région. En son temps, Elvis Presley n’aimait rien tant s’y rendre pour échanger et jammer avec ses amis, pour y trouver l’inspiration. Bien sûr, aujourd’hui, Beale Street a elle aussi changé mais elle garde tout de même une certaine patine vintage lui permettant de plonger ses visiteurs dans une atmosphère, à n’en pas douter, proche de celle qu’Elvis Presley appréciait tant. De nombreux restaurants et clubs y proposent des concerts et chaque jour sont célébrés le rock and roll, le blues, le swing et le jazz, jusqu’aux sonorités parfois plus modernes. C’est par ailleurs à l’extrémité de la rue que fut retrouvé le corps sans vie de Jeff Buckley après que ce dernier se soit noyé dans le fleuve Mississippi.

Sun Studio : le berceau du rock and roll

C’est au tout début de l’année 1952 que l’ingénieur du son Sam Phillips lance sa maison de disques. Il s’installe au 706 Union Avenue à Memphis, dans un local de taille modeste. Visionnaire, il parvient à enregistrer dès la première année des artistes amenés à faire bouger les lignes comme BB King, Rufus Thomas et Howlin’ Wolf. C’est encore à lui que Johnny Cash et Jerry Lee Lewis doivent certains de leurs enregistrements les plus mythiques.

La porte de Sun Records a accueillit Elvis Presley pour la première fois en août 1953.

Elvis Presley pousse pour la première fois la porte de Sun Records en août 1953. Âgé de 18 ans, il cherche à enregistrer deux chansons pour en faire cadeau à sa mère. Sam Phillips voit en ce fougueux musicien l’opportunité d’offrir à la musique noire une audience beaucoup plus large. En effet, à l’époque, dans cette région du sud, le racisme, encore très présent, cloisonne les artistes afro-américains à des endroits peu fréquentés par la population blanche, comme Beale Street. Quand il commence à enregistrer ses propres reprises, comme celle de That’s All Right, d’Arthur Crudup, Elvis rend non seulement hommage au génie des musiciens noirs mais impose aussi son propre style, à grand renfort de cris et autres déhanchés alors jugés scandaleux. Le succès incroyable des disques d’Elvis Presley permet au studio de se développer. Les ruptures de stocks sont fréquentes et très vite, Sam Phillips se rend compte qu’il ne pourra pas être en mesure de propulser Elvis Presley au rang de superstar. Une ambition dont se chargera le Colonel Tom Parker, que Sam Phillips rencontre en février 1955 avant de lui vendre le contrat d’Elvis pour 35.000 dollars. Une somme considérable pour l’époque, équivalente à plus de 380.000 dollars actuels, surtout compte tenu du statut de débutant d’Elvis Presley.

Sam Phillips voit en ce fougueux musicien l’opportunité d’offrir à la musique noire une audience beaucoup plus large.

Également populaire pour avoir accueilli la légendaire session improvisée du Million Dollar Quartet, avec Elvis Presley, Johnny Cash, Carl Perkins et Jerry Lee Lewis, le 4 décembre 1956, Sun Records a par la suite continué sa route, rencontrant le succès à plusieurs reprises et enregistrant des artistes comme Def Leppard et U2. Le film Elvis de Baz Luhrmann n’y a certes pas été tourné, alors que plusieurs scènes s’y déroulent, mais le studio a en revanche été exploité dans le cadre de Walk the Line et Great Balls of Fire, les biopics respectifs de Johnny Cash et Jerry Lee Lewis. Même la mini-série Elvis de 2005 y a fait étape. Il est aujourd’hui possible de visiter ce lieu mythique où le rock and roll est né il y a maintenant 70 ans.

Graceland : le saint des saints d’Elvis Presley

Elvis Presley achète Graceland en 1957 grâce aux recettes générées par Heartbreak Hotel, son premier disque d’or. Il débourse alors 102.500 dollars. Il y vit avec ses parents, Gladys et Vernon Presley. Son épouse Priscilla Beaulieu y reste 10 ans, de 1962 à 1972, jusqu’à son divorce avec la star. C’est également entre les murs de cette luxueuse propriété qu’Elvis Presley rendit son dernier souffle le 16 août 1977, dans sa salle de bain. Tout d’abord inhumé au cimetière de Forrest Hill, il a été transféré à Graceland où il repose depuis que des fans ont tenté de voler sa pierre tombale.

C’est entre les murs de cette luxueuse propriété qu’Elvis Presley rendit son dernier souffle le 16 août 1977.

Dès qu’il y emménage, Elvis Presley refaçonne Graceland à son image. Cette maison comprend ainsi 23 pièces, dont huit chambres et huit salles de bain. D’une surface de 1.360 m2, elle est richement décorée et est meublée avec de nombreuses antiquités et équipements onéreux renvoyant à l’extravagance de son propriétaire. En 1965, l’artiste commande la construction de la Jungle Room, une extension de Graceland où le musicien passe le plus clair de son temps. Dotée d’une cascade, décorée à l’aide de plusieurs plantes artificielles, elle a également servi de studio d’enregistrement en février et octobre 1976, quand il y a produit ses deux derniers albums From Elvis Presley Boulevard, Memphis, Tennessee et Moody Blue.

Après sa mort, Graceland est devenu le lieu de rassemblement des fans du monde entier.

Peu de temps après la mort du King, Graceland est devenu le lieu de rassemblement des fans du monde entier. Autrefois géré par Lisa Marie Presley, la fille d’Elvis, le domaine est aujourd’hui en grande partie détenu par une entreprise de divertissement. 700.000 visiteurs s’y pressent en moyenne tous les ans. En 2021, pour faire face à la pandémie de Covid-19, Graceland a même ouvert ses portes sur Internet avec des visites virtuelles. Les fans peuvent s’y promener, bien que certaines pièces restent closes, et admirer la collection de voitures d’Elvis Presley avant de se recueillir sur sa tombe. Un véritable temple du rock and roll que Baz Luhrmann a donc scrupuleusement reconstitué, à plus de 14.000 km de là, sur la côte dorée de l’Australie.

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Rédigé par Fantrippers

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